Partie de Notre-Dame vers 12h45, je suis arrivée au métro Cité à 12h49, pour me rendre à la Comédie
Française, station Palais-Royal, mais le temps qui me restait avant la représentation, et la faible distance
(et la météo encore clémente!) m'ont convaincue d'y aller à pied, avec un sandwich acheté à la Fête du Pain.
Marché aux fleurs, Quai de Corse, Seine, Place du Châtelet, rue de Rivoli, Louvre... Palais Royal,
nous y voici. J'ai récupéré mon billet à l'accueil. J'avais réservé cette place, en galerie, vingt-quatre jours
plus tôt, c'était la seule représentation du mois de mai où il restait de la place... Quel succès!
La galerie, c'est le poulailler du théâtre, mais j'étais au premier rang, et suffisamment au centre
pour bien voir, en se penchant au besoin par-dessus la balustrade. Autre surprise, je n'ai plus le vertige
à force de fréquenter tous ces lieux musicaux ou théâtraux haut-perchés, une fort bonne chose, bien pratique!
Tartuffe, l'une des meilleures pièces de Molière, selon moi, est mise en scène ici par Galin Stoev, d'origine
bulgare, qui a écrit dans le livret que Molière avait « un regard profondément lucide et perçant, ainsi qu'une
écriture aussi subtile que féroce ». C'est pour cela que nous l'aimons, et qu'il perdure des siècles plus tard...
Dans Tartuffe, Molière s'attaque aux faux dévots. Le dénommé Tartuffe, nom ridicule s'il en est, s'est insinué
dans une famille, en séduisant Orgon, le chef de famille, et sa mère, Madame Pernelle. Séduction morale,
s'entend, car Tartuffe se pique de religion et de hauteur d'âme. Orgon en a fait son directeur de conscience,
puis son directeur tout court. Se reposant sur le bonhomme, Orgon ne voit rien de son hypocrisie, qui
apparaît cependant parfaitement à sa fille, son fils, sa femme, son beau-frère, et aux domestiques.
Curieux aveuglement ! Orgon a même envisagé de rompre le lien promis entre sa fille
Marianne et son soupirant Valère, pour la marier de force à Tartuffe. Mais à trop vouloir en faire...
Tartuffe lorgne de moins jouvencaux appâts, en la personne de l'épouse d'Orgon, Elmire. Celle-ci le
repousse, puis devant la cécité de son époux à l'endroit du faquin qui a osé la courtiser sous le toit
de son bienfaiteur, Elmire envisage un moyen radical de tous les débarrasser de son encombrante
présence: en faisant semblant de lui céder, en présence d'Orgon. Tartuffe ne se fait pas prier,
et c'est en tenue légère qu'Orgon le surprend à entreprendre sa femme. Chassé par le maître de céans,
dont les yeux se sont enfin décillés, il profère que la demeure lui appartient, car Orgon lui en a fait
précédemment la donation, et envoie un huissier pour en expulser les occupants. Le cauchemar prend
fin par ordonnance royale, qui met Tartuffe à l'ombre et restitue leurs biens aux propriétaires.
Orgon était joué par Didier Sandre, que j'ai revu sur scène avec beaucoup de plaisir, Tartuffe par
Michel Vuillermoz, et le beau-frère Cléante par Denis Podalydès. L'affrontement Orgon-Cléante était l'un des
sommets de la pièce, en termes de jeu. L'assaut de Tartuffe sur Elmire, jouée par Elsa Lepoivre, en était
un autre. J'ai aimé les costumes, d'époque-mais-point-trop, le décor en trompe-l'oeil. La fin est un peu
sortie du chapeau (deus ex machina, c'est le cas de le dire!), on sent que Molière devait avoir de solides comptes
à régler avec les faux dévots de son temps ! La troupe a été très applaudie, et la difficulté à réserver
une place parle d'elle-même quant à l'attente du public pour cette pièce.
Je suis ressortie un peu en retard de la Comédie Française, ne retrouvant plus le vestiaire
où j'avais laissé mon blouson... Pour ne pas risquer aussi de me perdre dans les entrailles du métro, je l'ai pris
Place du Palais royal, où les visiteurs du Louvre déboulaient par flots, sous la pluie qui commençait à tomber.
Direction Montparnasse, où je pourrais travailler un peu, avec une boisson, avant de prendre le bus pour Massy.
Sylvie, blogmestre