Le soir du dimanche 30 juillet, il y avait projection à la Villette d'un film de Pierre Granier-Deferre,
de 1975, avec Simone Signoret et Jean Gabin, intitulé "Le chat". Le thème du cinéma en plein air
de cette année 2017 étant "à table!", je redoutai que le pauvre chat en question ait fini en gibelotte...
J'allai m'en assurer sur place, et arrivai Porte de Pantin à 21h38*
A mon arrivée, il y avait moins de monde que la veille au soir, mais de nombreux spectateurs
arrivèrent comme moi, peu avant le début de la projection, et il me fut plus difficile de ressortir
à la fin, que la veille au soir. J'étais nettement plus proche de l'écran que la veille.
Le film était adapté d'un livre de Georges Simenon, c'était un drame absurde et lancinant du quotidien,
une belle histoire d'amour qui tourne mal avec le temps, dans le Courbevoie en pleine mutation
urbaine des années 70. Petits quartiers pavillonaires devenus de rares verrues persistantes aux
façades lépreuses, expropriations, chantiers, immeubles abattus à la masse, bruit incessant. A la
violence interne du couple des deux protagonistes, répondait celle, externe, de leur environnement.
Clémence, artiste de cirque, était devenue boiteuse après un accident, et alcoolique. Julien, ouvrier
dans l'imprimerie, l'avait épousée et ils étaient venus habiter "la maison du bonheur" dans cette
banlieue tranquille de l'Ouest parisien, muée depuis en eldorado pour les constructeurs d'immeubles
de La Défense. Dans ce couple qui ne se parlait plus, un jour, un jeune chat faisait irruption, trouvé
par Julien, et cristallisait rapidement toute la jalousie de Clémence. Un jour où les deux conjoints
se disputaient, Clémence, dans un crise de folie, tua le chat. Elle ne survivra pas au mutisme total de
Julien, infligé en représailles, et celui-ci mourra de l'avoir vue mourir. Une évocation ciselée de la fin
des Trente glorieuses, accouchant d'un univers impitoyable. Un Simenon bien glauque.
A mon arrivée, quelques djeun's sont repartis, constatant que le film datait de 1975. Les spectateurs qui sont restés
n'ont pas décroché, riant des mimiques du chat, ce qui vu la lourdeur du climat de ce film, était probablement
l'expression du relâchement momentané de la tension psychologique. Noir, c'était noir, totalement noir.
Un film de facture classique, sans le second degré de la Nouvelle vague, à laquelle Granier-Deferre
n'était pas favorable, avec des acteurs très confirmés, par l'un des réalisateurs qui adaptèrent la
série des Maigret à l'écran. Petits détails qui en disaient long, comme les placards cadenassés, toute
la science de Simenon et de Granier-Deferre était là. Présence d'Annie Cordy en tenancière...
Comme vous pouvez le constater, tout le monde était parfait dans ce film, même le chat jouait juste.