Concert émotion hier soir au grand auditorium de Radio France, où Daniele Gatti faisait ses adieux à
l'Orchestre National de France qu'il a dirigé depuis 2008, et au public qui l'a accompagné pendant
toutes ces années (ou un peu moins pour les arrivées plus récentes, comme la mienne).
Dès que j'ai pris le métro à Denfert-Rochereau, je l'ai trouvé anormalement bondé pour l'heure, avant de comprendre, comme
il ne désemplissait pas et avait plutôt tendance à s'engorger, que c'était la ligne desservant le Champ de Mars où avait lieu
un méga-concert de DJ vedette, organisé en plein état d'urgence (?!) dans une capitale remplie de poubelles pleines.
L'avenue du Président Kennedy était un grand bazar, totalement bloquée des deux côtés par de trop nombreux véhicules,
et les deux-roues n'hésitaient pas à rouler sur le trottoir, en frôlant les passantes qui révisaient Cherubini en chemin.
Flammis acribus addictis! Du coup, la file d'attente devant la Maison de la radio était moins longue que d'habitude...
Voici le grand auditorium vu de ma place à 19h55, l'assistance était encore très clairsemée.
Il s'est rempli par la suite, et nous avons commencé en retard. Des personnes sont encore arrivées
pendant la première partie, probablement retardées par les encombrements.
Ci-dessus, l'Orchestre National de France, dans sa formation d'hier soir. Conséquence intéressante du retard
des autres spectateurs: même au 2è balcon, avec mon arrivée peu avant 20h, j'ai eu un programme. D'habitude l'heure et la
hauteur font qu'il n'y en a plus. Un très beau programme, avec une interview de Ganiele Gatti et de belles
photos. Ce beau programme annonçait la 3è symphonie d'Arthur Honegger, dit "Symphonie liturgique"
et la cantate "Alexandre Nevski" de Serguei Prokofiev, séparées par un entracte.
La 3è symphonie de Honegger
Ci-dessus le Choeur de Radio France, qui a participé à la cantate de Prokofiev, en deuxième partie
du concert. Il était dans la corbeille choeur, et je n'en voyais que les deux-tiers de ma place.
La cantate "Alexandre Nevski" a été créée en 1939 à Moscou. Alexandre Nevski était Prince de Novgorod
au XIIIè siècle, qui s'était battu contre l'Ordre des chevaliers teutonniques, et en avait triomphé, ce qui en 1939
prenait tout son sel. C'était avant la signature du pacte germano-soviétique! Le cinéaste Sergueï Eisenstein
avait réalisé un film intitulé "Alexandre Nevski" en 1938, donnant dans l'exaltation patriotique et la
propagande, dont Prokofiev avait composé la musique. La cantate entendue hier soir était un arrangement
de concert de la musique écrite pour le film d'Eisenstein. Elle était divisée en sept mouvements, dont l'un
s'intitule "Debout, peuple russe!", ce qui donnait le ton de l'ensemble. Dans le livret du concert, on trouvait
les paroles de la cantate, quelle bonne idée! Pour le style choral, on était dans la musique populaire
russe de l'époque, plus près des chants de l'Armée rouge que de la liturgie orthodoxe, mais écrite par Prokofiev,
c'est à dire une magnifique partition, superbement interprétée par le Choeur de Radio France,
et la soliste mezzo-soprano Olga Borodina. On retrouvait dans l'oeuvre de Prokofiev le bruit et la fureur
déjà évoqués dans celle de Honegger, avec abondance de percussions.
Une unité d'expression, pour un très beau concert.
On a senti l'émotion pendant toute la soirée, tant de la part du chef, que des musiciens et du public.
Dernier concert de Daniele Gatti au grand auditorium de la Maison de la Radio. Le public s'est
exprimé par les mains, comme il est autorisé à le faire, et le chef aussi, très sobrement.
Ci-dessous les adieux de Daniele Gatti, de son orchestre, et de son public, en ce soir du 9 juin 2016:
Une page qui se tourne pour l'Orchestre National de France. Nous sommes ressortis un peu après 22h,
l'avenue du Président Kennedy avait repris une allure normale, et la Tour Eiffel brillait doucement dans le crépuscule.
Les bateaux-mouches avaient survécu à la crue, solidement amarrés, en chômage technique.
Sylvie, blogmestre