Il y avait hier soir concert extraordinaire en la cathédrale Notre-Dame de Paris, dont le parvis
s'ornait d'une longue file polyglotte de postulants à l'entrée. Toute la communauté britannique parisienne
semblait s'être donné rendez-vous dans la nef pour le concert du Parliament Choir, qui rassemble des
députés des deux chambres du Parlement du Royaume Uni, et des personnes y travaillant.
Ce qui faisait environ une centaine de choristes (il y avait une grande photo dans le programme).
L'orchestre, le Southbank symphonia, était composé d'une trentaine de musiciens.
Notre-Dame était en disposition retournée. Je trouvai une place au troisième rang latéral.
Dans le texte de présentation du livret du concert, rédigé par Nicholas O'Neill, je retrouvai les souvenirs qui
me restaient du Gloria de Poulenc, que j'ai chanté en choeur de 300 choristes devant quelques milliers de personnes dont un
président et un chancelier en exercice, sous la baguette de Theodor Guschlbauer, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une oeuvre
mi-religieuse, mi-amusée, comme en témoigne ce "lauda... lauda... laudamus te! " qui clôt le Laudamus te où les
pupitres semblent se renvoyer une balle de l'un à l'autre. Ci-dessous le début du Laudamus te:.
Nicholas O'Neill écrivait que Poulenc "n'est sûrement pas un compositeur léger, même s'il se prend
lui-même rarement au sérieux". Ce Gloria, qui m'avait semblé difficile à l'époque où je l'ai appris, par son balancement
entre deux tonalités m'a paru beaucoup plus simple hier soir, côté choristes. La partie de soprano solo recèle en
revanche quelques pièges subtils que notre interprète d'hier soir, Ilona Domnich, a évités avec grâce.
Voici un extrait du Qui sedes ad dexteram Patris, où l'on entend bien les modulations de tonalité:
Le Gloria, qui était le morceau de bravoure du concert, fut très applaudi. Je verrais bien la Maïtrise d'adultes
de Notre-Dame dans cette oeuvre... Les Cinq variations sur Dives et Lazare qui suivirent mettaient en scène
harpes et cordes sur une pièce folklorique anglaise, sans choeur, une oeuvre très agréable à écouter.
Suivit un choeur de Howells, "Behold O God our defender", écrit en prévision du couronnement
d'Elisabeth II en 1952, puis vint "Tu es Petrus", une création de Nicholas O'Neill.
Ce concert à Notre-Dame de Paris était sa seconde exécution. L'auteur a qualifié Notre-Dame
de "lieu béni musical dont l'importance est immense pour tout compositeur féru d'histoire". Il faisait
allusion à la toute première polyphonie grégorienne à voix indépendantes, qui fut composée par Perotin
de l'Ecole de Notre-Dame il y a huit cents ans (que l'ensemble vocal me corrige si je me trompe), ouvrant la voie
à toute la musique polyphonique occidentale. Perotin est un diminutif de Pierre, Petrus en latin, comme
Pierre le disciple sur qui l'Eglise catholique serait bâtie, d'où le nom "Tu es Petrus" de la composition
de Nicholas O'Neill, considérant Perotin comme la pierre sur laquelle la polyphonie moderne était bâtie.
J'ai trouvé l'hommage à la cathédrale et aux premiers compositeurs de polyphonies touchant.
Ce fut un beau concert. J'ai aimé la simplicité de ces parlementaires anglais (le pupitre de basses
comptait plusieurs Lords et plusieurs Sirs, et les sopranes et alti plusieurs Baronesses), venant nous chanter
de la musique française à domicile, un hommage d'une élégance toute britannique.
Sylvie, blogmestre